Il faut bien se rendre à l’évidence, La tête sous la couette, ça ne marche pas constate Babette le lendemain matin, après avoir pris connaissance des informations.
Pour la première fois depuis le début de ces temps chamboulés, elle se sent désemparée. Peut-être est-ce le moment de faire le point se demande-t-elle pour évaluer les options et aménager les journées le plus agréablement possible.
Passée la stupéfaction horrifiée de la première mise en confinement, la découverte du contour de sa nouvelle vie qui se modelait jour après jour, avait eu ce petit quelque chose d’indéfinissable en plus, comme un goût de mystère. Terriblement moche c’est vrai mais terriblement neuf aussi, se rappelle Babette.
Tout était une « Première » à ce moment-là. Je m’observais, je me challengeais, je me testais, parfois je me ramassais, souvent d’ailleurs. Des scoops à répétition. Une incursion dans un polar -celui de ma vie- où des énigmes surgissaient. A moi de les résoudre. Ou pas. L’existence devenait malgré tout intéressante.
Aujourd’hui, rien de tout cela. Ce n’est qu’une pâle copie de cette vie tronquée qui se profile à l’horizon. On sait ce qui nous attend. Toujours aussi terriblement moche mais plus du tout neuf. Rien de sensationnel. Aucun attrait.
Le bouton « imagination » ne répond plus. Il doit être cassé à force d’avoir été sollicité. Il y a sans doute un quota au-delà duquel il se bloque automatiquement, se dit Babette. Faudrait trouver la formule pour le reseter.
Pas génial l’état des lieux, constate-t-elle. Mais c’est avec ce piètre bilan qu’il faudra que je compose, se dit-elle résignée. Surtout, ne pas perdre de vue l’essentiel se reprend-elle : neutraliser l’ennemi commun.
Malgré tout, comme une rengaine lancinante, comme un écho assourdissant d’un passé trop proche, les mêmes questions : Pourquoi ? Retrouverons-nous un jour l’insouciance de vivre à découvert ?
Stop. Stop aux jérémiades et aux regrets ; stop aux questions fumeuses s’encourage Babette, demain est un autre jour, à moi d’en sortir une belle histoire.