Place du marché, jour de semaine.
Les cheveux blancs et gris se croisent, virevoltent, tournoient. Inlassablement. Une chorégraphie savante et gracieuse, rejouée chaque mercredi au cœur du village.
Ils sont tous là. En couple, en bandes, ou seuls, jamais absents du rendez-vous. Certains se faufilent en douce pour grignoter une place, d’autres prennent la file à l’envers, comme des enfants pressés. Pourtant, ils ont tout leur temps ! Mais c’est plus fort qu’eux, comme un écho de cour de récréation — entre compétition, jeux et moqueries.
Les clans, les meneurs, les suiveurs qui opinent du bonnet. Les couples timides qui se tiennent la main par habitude ou par peur d’être laissés. Les solitaires, qui se rapprochent mine de rien pour ne rien perdre. Saluts, conciliabules, bousculades légères.
Éclats de rire étouffés, sourires entendus, clins d’œil complices. On échange nouvelles, potins acidulés, civilités avec le vendeur qu’on connaît depuis toujours et l’inconnu dans la file. C’est leur actualité.
La place est stratégique.
On remplit le sac et on recharge ses batteries. L’un ne va pas sans l’autre.
Et quand sonne l’heure du retour, chacun repart revigoré. Comme neuf. De quoi tenir jusqu’au prochain marché.
Jusqu’à la prochaine danse.