Thomas, ou plutôt petit Tom, puisque tout le monde l’appelle ainsi, est un gentil petit garçon très joyeux et passionné de gros véhicules.
Dans sa chambre, des camions pompiers côtoient des ambulances, des fourgons de police, des camions bennes, des bus et même des trains ! tout ce qui roule et qui prend beaucoup de place l’intéresse au plus haut point. Heureusement, il a une très très grande chambre. Mais ce qu’il préfère entre tous, c’est son tracteur.
C’est un bel engin, ni trop gros ni trop petit. Il est vert, sa cabine a un toit jaune et il a une grosse cheminée noire. En plus, il traine toujours une petite remorque grise un peu cassée sur les bords. Il l’adore ce tracteur ! Même si sa peinture s’écaille, même s’il grince lorsqu’il roule et même si sa remorque à tendance à partir de travers, c’est son chouchou. Il l’a baptisé Hector. Avec lui, il laboure les champs et charrie les bottes de foin dans sa remorque ! C’est sûr, quand il sera grand, il conduira un gros tracteur et labourera tous les champs de la ferme et de la région.
Or, ce soir, petit Tom est inconsolable. Il pleure à chaudes larmes. Il s’est enfermé dans sa chambre et ne veut plus voir personne.
Que s’est-il donc passé pour qu’il soit dans un tel état ?
(Mais) revenons quelques instants plus tôt.
Hector vient d’avoir un accident. Un très grave accident.
Alors qu’il était installé sur la table de la cuisine et qu’il démarrait un sillon, il a dérapé et est tombé sur le sol où il s’est fracassé en mille morceaux. Sa remorque a valsé à l’autre bout de la pièce, ses roues se sont détachées et se sont projetées chacune de leur côté, sa cabine s’est coupée en deux et sa belle cheminée s’est repliée comme un gros boudin … Hector n’était plus qu’un amas de ferraille et de caoutchouc.
Petit Tom a hurlé de choc et de désespoir.
– Non, non, pas Hector !
Sa maman a tenté de le consoler en lui promettant un tracteur encore plus beau mais petit Tom n’en veut pas. Il veut son Hector à lui. Tristement il en a ramassé tous les petits bouts et s’est sauvé dans sa chambre en claquant la porte.
Après un long moment, les sanglots se sont espacés puis c’est le silence. Petit Tom a fini par s’endormir mais son sommeil est agité et entrecoupé de gros soupirs.
Ses autres joujoux à roues, choqués par le terrible accident et par la détresse de leur petit maitre, se rassemblent silencieusement autour de son lit. Ils examinent ce qui reste du tracteur. Ce n’est pas folichon. Ils ne reconnaissent pas du tout Hector.
-avons-nous un chirurgien ? demande Léo le pompier, dégringolé en catastrophe de son camion.
-Non, nous n’en n’avons pas … et malheureusement, je ne peux rien faire, soupire Théo le médecin, arrivé juste derrière lui.
-mais tu avais pourtant réparé Nounours, remarque Max, un des gendarmes.
-cela n’a rien à voir, dit Théo, je l’ai juste recousu, et ce n’était pas grave mais là, c’est un mécanicien qu’il faut…
-Nous n’avons même pas de mécanicien, s’exclame Mona la conductrice routière, dépitée
-Il faut donc en trouver un d’urgence reprend Léo le pompier. Il faut absolument remettre Hector sur roues, sinon notre petit Tom ne s’en remettra pas.
-Tu as raison dit Max le gendarme, mais qui pourrait bien nous aider ?
Ils ont beau se creuser la tête, rien ne vient.
-j’ai une idée s’exclame soudain Béa, l’infirmière.
Tous les regards, se braquent sur elle.
-vous vous souvenez de Lucas, le meilleur ami de petit Tom ? Leur demande-t-elle
-oui bien sûr répondent-ils en cœur, il vient souvent jouer avec nous rajoute Mona la conductrice de camion, il est très gentil et je dois reconnaitre qu’il conduit comme un chef.
-eh bien, reprend Béa, je sais que Lucas a un garage. Il doit donc y avoir des mécaniciens. Vous pourriez peut-être leur demander de l’aide suggère-t-elle.
-Excellente idée répond Léo le pompier, il n’y a pas de temps à perdre. Max, Tu m’emmènes ? avec ta sirène, on ira plus vite !
Max branche la sirène et ils disparaissent dans un bruit d’enfer. L’attente s’installe. Chacun pense au pire et personne n’ose rompre le silence. Enfin, après un temps si long qu’il ressemble à une éternité, le fourgon freine brutalement devant le lit de petit Tom. Trois hommes en descendent, Léo, Max et Lucien, le mécanicien.
Pendant que Lucien examine attentivement les fragments d’Hector, les jouets retiennent leur souffle. Ils attendent le verdict.
– je ne vous promets rien finit par dire Lucien, mais je pense pouvoir faire quelque chose
-Ouf ! merci, s’écrient les jouets.
-Peux-tu le réparer tout de suite ? demande Léo
-Il me faut mes outils répond Lucien ; je fais l’aller-retour et je m’y mets. Mais, je vous préviens les amis, la nuit sera longue. Et pendant mon absence, pouvez-vous rassembler toutes les pièces du tracteur et les mettre au milieu de la chambre ?
Les jouets sont heureux de participer à la renaissance d’Hector, et ils exécutent les instructions de Lucien avec empressement…En un clin d’œil, tous les fragments sont disposés au milieu de la chambre.
L’attente est de courte durée cette fois-ci. Lucien est déjà revenu avec sa caisse à outils.
Léo grimpe dans son gros camion de pompier tout rouge et tout brillant pour stationner à bonne distance de Lucien. Il veut l’observer et lui venir en aide si nécessaire mais sans le gêner ; Max monte dans son fourgon de police, il est tout bleu lui et il le place à côté du véhicule de Léo ; Théo invite Béa dans sa voiture, c’est une ambulance blanche et si longue qu’elle prend la place d’au moins deux voitures ; Mona gare son gros camion jaune entre les deux. Georges, le chauffeur de bus et Medhi le chauffeur de train se rapprochent aussi car ils ne veulent pas perdre une miette de l’opération périlleuse de ce soir. A eux tous, ils forment un joli cercle multicolore autour de Lucien.
Bouche bée, Ils suivent avec attention l’intervention et s’émerveillent.
Lucien travaille vite et bien. C’est un magicien. Sous ses doigts agiles, Les pièces s’imbriquent les unes dans les autres comme dans un puzzle ; et on voit apparaitre une portière, puis les poignées, le marchepied, la cheminée droite comme un i, les roues reprennent leur place, elles sont maintenant bien regonflées et solidement vissées ; La remorque retrouve son crochet à l’arrière du tracteur. Un peu de colle magique ici, quelques touches de vert ou jaune par-là, et soudain, Hector est sur ses roues, encore plus beau que tout neuf !!
-Bravo Lucien, mille mercis s’écrient les chauffeurs en l’applaudissant.
Lucien soupire, il est fatigué de sa nuit mais heureux d’avoir réussi à ressusciter Hector. Il ne l’avait pas avoué à ses amis, mais au début, la partie était loin d’être gagnée car certains morceaux étaient très abimés. Mais il avait réussi et le plus important maintenant c’est que petit Tom puisse à nouveau jouer avec Hector.
D’un geste de la main en guise d’au revoir, il part rejoindre le garage de Lucas.
La nuit aura été bien agitée ! et c’est déjà le matin…Camions, ambulances, bus et trains regagnent leur place habituelle. Après tant d’émotions, un peu de repos ne sera pas du luxe !
Petit Tom est très agité. Il se tourne et se retourne dans son lit comme une crêpe ! Durant son sommeil, il avait eu l’impression que des formes s’agitaient autour de lui, et n’en finissaient pas de chuchoter et de bouger. Il faut que je les chasse se disait-il en boucle, il faut que je les chasse … Je veux sortir de mon rêve maintenant.
Enfin, après un gros effort, Il ouvre finalement les yeux et la première chose qu’il voit, c’est Hector.
-Mon pauvre Hector s’écrie-t-il en le saisissant avec joie, si tu savais ! j’ai fait un cauchemar. J’ai rêvé que tu étais complétement cassé et que maman voulait te jeter. Heureusement que ce n’était qu’un vilain rêve. Tu es encore plus beau qu’hier ne peut-il s’empêcher de remarquer.
Un sourire rêveur sur les lèvres, il promène ses mains sur un Hector entier, lisse, éblouissant de vert et de jaune et le pose doucement sur ses genoux. Ce soir, au retour de l’école, eh bien, tous les deux, ils iront labourer.
Trois petits coups à la porte, c’est maman qui vient réveiller petit Tom. C’est l’heure de se lever pour aller à l’école.
-Tiens, il a retrouvé un tracteur se dit-elle, je ne me souvenais pas de celui-là, il ressemble comme deux gouttes d’eau à son Hector….. C’est comme Nounours et sa grande déchirure qui disparait du jour au lendemain. …il y a des mystères dans cette chambre… mais petit Tom est heureux et c’est bien le plus important.
Dans leur coin, les jouets frémissent de bonheur. Ils peuvent se féliciter, ils ont fait du bon travail et leur petit Tom peut partir heureux à l’école.