…Et on sait tous qu’une promesse est une promesse…

Anastasia n’aime pas les départs. Elle a horreurs des adieux. Et le moment qu’elle redoute le plus, c’est « l’entre-deux ».

Le soleil vient de lui tirer sa révérence avec élégance mais fermeté.

Il s’éloigne inexorablement ; ses rayons pâlissent de jours en jours, il s’en va briller de l’autre côté. C’est son heure et il n’y peut rien. Elle le sait.

Néanmoins, la nostalgie s’installe. Anastasia s’entête à ressasser la douceur chaleureuse de ses caresses, son indolence, sa gaité, ses couleurs éblouissantes, ses promesses de lendemains enchantés. Elle se perd et se complait dans ses souvenirs.

Avec lui, s’en est allé le rire. Le rire spontané. Le rire contagieux, le rire inextinguible.

« L’entre-deux. » a du mal à passer.

Son successeur n’a pas encore investi la place. Il tarde à s’installer. En l’attendant, arrêt sur une image froide et impersonnelle. Les couleurs sont ternes sous un ciel bas, blanc, gris, uniforme. Ce sont celles de la tristesse. Aucun relief.

Anastasia sombre dans la mélancholie. Envie de rattraper le soleil. De le supplier de ne pas partir. Trop tard. Il est déjà loin. Il a promis de revenir…. Mais pas avant l’année prochaine.

La mort dans l’âme, Anastasia se résigne au froid et au silence.

Ses pas l’emmènent sans conviction ni entrain vers sa destination.

Soudain, sans crier gare, le ciel se pimente de volutes grises et noires, le vent se lève, juste assez pour effleurer sa joue et, comme un voile qui se déchire subitement, les couleurs se réveillent ; la gamme des blonds chaleureux et craquants se mélange aux éclats rouges sang ; le tapis au sol se fait somptueux ; le paysage reprend ses formes en mouvement ; les arbres murmurent entre eux les secrets de l’été; des senteurs subtiles se révèlent à son odorat et elle distingue l’odeur bien particulière des gouttes eau, suspendues dans l’air, prêtes à tomber et celle de l’humus et ses promesses gourmandes .

Anastasia n’en croit pas ses yeux ! la vie reprend avec d’autres nuances, d’autres impulsions, d’autres joies. La place vient d’être comblée !

Son successeur a pris son temps mais il est là maintenant avec son lot de belles surprises. Il faut juste s’y faire, s’y adapter.

Une approche différente. Une séduction mystérieuse, tout en finesse.

Anastasia sent le bien-être l’envahir. Elle est rassurée. Des images réconfortantes se succèdent, une cheminée, un feu, des crépitements, des effluves de cacao …

Oui, elle peut faire avec !

Du bout de l’horizon, dernière pirouette du soleil qui semble lui dire «chère Anastasia, je te laisse entre de très bonnes mains », … 

Anastasia soupire de soulagement.

Elle fera amie-amie avec ce nouvel occupant, le temps de son séjour. Ensuite, pour l’autre « entre-deux », il sera toujours temps d’aviser….