L’extraordinaire mésaventure de Ninan, la petite boule magique

Ghis écrit, Graines de rêves

L’extraordinaire mésaventure de Ninan, la petite boule magique

Un jour, une petite boule argentée fit irruption dans la chambre de Rose.

Comment était-elle entrée ? Mystère.
Elle avait roulé tranquillement autour de la chambre comme pour l’explorer, s’était arrêtée quelques instants devant Nounours pour le saluer, puis, après quelques rebonds gracieux, vint se nicher dans le creux de la main de Rose.

Pas plus haute que trois pommes, Rose ne parlait pas encore mais gazouillait et riait du matin au soir. Ses bouclettes blondes, ses joues rondes et ses yeux bleus malicieux la rendaient irrésistible. Elle adorait se blottir dans les bras moelleux de son immense nounours chocolaté et s’amuser avec Sylvie, sa poupée de chiffon, ou Poppy, son petit chien roux, ou Margot, la vache mouchetée… et tous les autres petits compagnons de son univers enchanté.

Lorsque la petite boule argentée était venue se loger dans le creux de sa main, Rose n’avait même pas été surprise. Elle s’était saisie de la boule, l’avait observée sur toutes ses rondeurs, fascinée par sa brillance et sa légèreté. Elle lui avait parlé avec conviction tout en gloussant de joie comme si elle l’attendait depuis toujours pour s’amuser. Elle l’avait baptisée Ninan, un des seuls mots qu’elle savait dire après « papa » et « maman ».

Dès lors, Rose et Ninan devinrent inséparables. La petite boule participait à tous les jeux, et semblait saupoudrer tout ce qu’elle frôlait. Au moment des repas, elle trônait sur le plateau de la chaise haute. Le soir, lorsque le papa ou la maman racontaient une histoire, elle reposait au bord du matelas, veillant sur le sommeil de Rose.

Or, un matin, à son réveil alors que Rose tâtonnait pour s’en saisir, elle ne la trouva pas. Sa Ninan avait disparu. Elle eut beau l’appeler : en vain. Ses pleurs déchirants alertèrent ses parents, qui fouillèrent la maison de fond en comble. Rien. Aucune trace de la petite boule. Elle avait disparu avec autant de mystère qu’elle était entrée dans la maison.

Depuis la disparition de sa Ninan, Rose avait cessé de rire et de gazouiller. Même ses jouets les plus précieux ne l’intéressaient plus.

La maison était devenue silencieuse comme si elle retenait son souffle.

Nounours, qui veillait sur Rose depuis sa naissance, décida d’agir. Il ne supportait plus de voir sa petite princesse si mal en point.

– Mes amis, dit-il gravement, notre petite princesse se laisse dépérir. Nous devons retrouver Ninan.

Tous les jouets s’approchèrent, rejoints même par les personnages de ses petits livres, sortis de leurs pages tant leur inquiétude était grande.
– Mais ses parents ont déjà cherché partout, objecta Poppy.
– Pas au bon endroit, insista Nounours. Reprenons les recherches !

Plein d’espoir Ils fouillèrent chaque recoin. Mais plus le temps passait,  plus ils soupiraient de tristesse.

Soudain, les page d’un vieux magazine se mirent à trembler comme si un souffle les secouait puis une grosse boule de papier, toute craquelée fut projetée au sol.

Et là, sous les yeux stupéfaits de Nounours, Poppy, Sylvie, Margot et tous les autres, Ninan apparut… méconnaissable. Recouverte de bouts de feuilles multicolores, elle avait perdu tout son éclat argenté.

-Ninan ! s’écria Nounours. Mais d’où viens-tu ?

Bouleversée, la petite boule prit quelques instants avant de répondre.
– Et Rose, commentva-t-elle ? demanda-t-elle, anxieuse.

Les jouets échangèrent un regard triste.
-Ton absence l’a plongée dans une grande tristesse, avoua Nounours. Que t’est-il arrivé ?

Alors Ninan raconta.
– L’autre soir, alors que Rose s’endormait, j’ai senti un tremblement étrange. Je suis tombée et je me suis sentie happée par l’espace et maintenue à quelques centimètres du sol. C’est alors que ce vieux magazine poussiéreux m’a avalée.
-Oh ! oh ! firent les jouets, consternés.
-Je me suis débattue, mais ses pages se refermaient sur moi me faisant prisonnière. Je ne pouvais plus rien entendre ni rien voir.

Un silence ému accueillit son récit.
– Comment as-tu réussi à t’échapper ? demanda Sylvie la poupée.
– Dans un ultime sursaut, en pensant très fort à Rose, j’ai senti les pages s’humidifier. Alors j’ai réussi à me décoller.

Ninan soupira profondément.
-Ma mission était de veiller au bonheur de Rose, pas de lui causer du chagrin. Je veux qu’elle ne soit plus jamais triste.

-Mais d’abord, dit Sylvie doucement, il faut te rendre ta vraie apparence.

Alors tous les jouets s’approchèrent et, avec mille précautions, retirèrent les morceaux de papier coloré. Bientôt, Ninan retrouva son éclat argenté. Ils lui firent une haie d’honneur, et la petite boule roula en silence vers Rose.

Elle rebondit prestement et se nicha dans le creux de sa petite main, comme elle en avait l’habitude et comme si rien ne s’était passé.

Assise au sol, la fillette fixait le vide

Mais quand Ninan vint se lover dans le creux de sa main, comme autrefois, elle reconnut aussitôt sa présence. Ses yeux s’illuminèrent, son visage s’épanouit.
-Ninan, Ninan, Ninan, Papa, maman, Ninan s’écria-t-elle tout en la couvrant de baisers.

Les jouets soupirèrent de soulagement. Ses parents accoururent, craignant une nouvelle crise, mais ils découvrirent Rose dansant de joie, sa Ninan serrée contre elle. Et depuis ce jour, la maisonnée vibra de nouveau aux éclats de rire de Rose.
Ninan, fidèle gardienne, ou fée marraine, se promit de ne plus jamais quitter sa princesse.

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